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LA VIE ET LA MORT DES FÉES

puissance, retourne chez les siens, parmi de rieuses jeunes filles qui ne sont plus des carottes, et retrouve son amoureux, le beau prince Ratibor. Comme Merlin par Viviane, Rübezahl est joué par Emma, mais d’une façon plus légitime.

Les expériences de Rübezahl en ce qui concerne la race humaine étaient plutôt mélancoliques. Il continua à s’occuper des hommes, quelquefois pour les berner, d’autres fois pour les secourir. Il leur jouait des tours dignes du Puck anglais, mais il était ravi de découvrir la patience et l’abnégation de l’amour maternel : « Quelle brave créature est une mère ! » songeait alors Rübezahl.


II


Jusqu’ici nous avons vu l’imagination, la poésie, la fantaisie s’amuser à faire revivre de vieux contes ou à en créer de nouveaux. Maintenant c’est la science même, la science philologique, dans la personne des frères Grimm, qui va se mettre à l’école des vieilles paysannes, des humbles fileuses, des naïves conteuses de veillée. Ils ressaisiront sur leurs lèvres le fil des traditions perdues. Une habitante de Niederzwerhn près de Cassel dans la Saxe, fut pour eux une véritable Mère l’Oye. Elle puisait à plaisir dans le trésor de sa mémoire, et elle récitait avec feu, mais en s’évertuant à conserver respectueusement tous les détails, sans leur faire subir aucune modification, les légendes et les contes par lesquels on avait bercé sa propre enfance. Et, sous sa dictée, ces hommes graves, ces savants renommés, écrivaient…