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LA VIE ET LA MORT DES FÉES


III

LES FÉES DE TENNYSON


Les Idylles du Roi, de Tennyson, transportent dans la Grande-Bretagne de Burne-Jones et de la reine Victoria la quintessence des longs romans de chevalerie. Elles raniment les anciens héros : Arthur, Lancelot, Merlin, Genièvre. Mais la forêt antique où ils se meuvent a pris un air de parc anglais.

Il est de frais décors et des scènes charmantes à travers ces Idylles du Roi.

Avec les compagnons de la Table-Ronde et l’enchanteur Merlin, voici reparaître Viviane, la grande fée de Brocéliande, mais, comme tous les autres personnages des vieux poèmes, elle s’est modernisée : de plus en plus subtile, de plus en plus gracieuse, de plus en plus perfide, elle met un art exquis à faire de Merlin sa dupe, et sa psychologie affinée et inquiétante donnerait à qui la développerait la matière de bien des pages de roman.

Vous dormiez, Viviane, dans la forêt magique, et voilà qu’un son de harpe légère vous a réveillée. C’est un poète du Nord, descendant des bardes bretons que vous connûtes, et, sur une musique nouvelle, il a chanté votre nom. Alors le bois de Brocéliande a délicieusement refleuri. Ce poète vous a vue, Viviane, aux pieds de l’enchanteur Merlin. L’air était lourd d’orage. Vous étiez vêtue comme une fée de Burne-Jones, d’une robe vert tendre, avec un cercle d’or dans vos beaux cheveux. Il y avait