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Page:Félix-Faure-Goyau - La vie et la mort des fées, 1910.djvu/411

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LA FÉERIE DANS UN CERVEAU DU NORD : ANDERSEN

doigts, mais de leur langue. Et cet ouvrage laisse bien loin derrière lui le fil innocent et la laine inoffensive où s’occupent leurs mains !

Tant de contes délicieux ont une morale ; et une philosophie propres à satisfaire les muettes mélancolies et les secrètes rancœurs des âmes désabusées. Qu’il y a de désenchantements sous la trame brillante et légère de ces récits ! Mais rassurez-vous, la jeune aveugle saura recueillir des grains de vérité épars à travers les existences humaines. Andersen croit que les grandes victoires sont réservées aux êtres humbles et patients. C’est pourquoi il reprend avec bonheur l’exquise légende de Grimm sur les beaux princes changés en cygnes, et sur le dévouement persévérant de leur sœur qui, sans parler, continue à tisser leurs chemises et ne s’interrompt même pas en allant au supplice ! Elle sera délivrée et délivrera ses frères.


VI


Les souvenirs des contes étrangers sont assez rares chez Andersen. Cependant la méchante princesse du Camarade de Voyage nous rappelle les anciennes légendes médiévales de l’Inconnu bel à voir.

Mais elle vient peut-être de plus loin encore. Elle descend du sphinx prêt à dévorer ceux auxquels demeurait caché le mot de l’énigme. Il y a, dans les plis de son voile, de la poussière des routes thébaines. Elle a dû recevoir quelques leçons de séduction de la Circé d’Homère, de la Dragontine de Bo-