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LA VIE ET LA MORT DES FÉES

d’Amadis, le damoiseau de la mer, comme Viviane, Dame du Lac, le fut de Lancelot. Urgande favorisait les amours d’Amadis, écrivait aux princes, s’occupait de politique, et, pour y réussir, avait cette bonne fortune de pouvoir changer de visage.


IV

LA FÉE MORGANE


D’où vient-elle, cette fée Morgane qui domine tout le moyen âge et toute la féerie, alors que sa rivale, Viviane, ne règne guère que sur Brocéliande ? Étrange, capricieuse, un peu hagarde comme son maître Merlin, elle unit, semble-t-il, dans ses tresses brunes, l’algue marine à la fleur de pommier. Sans doute, avant d’être nommée par les poètes, elle défraya de longs récits, et, peut-être, faut-il, une fois de plus, la reconnaître lorsque Guillaume de Rennes, au treizième siècle, parle d’une vierge royale, d’une fille nympha, d’un dieu maritime, qui soigne Arthur de ses blessures.

Serait-ce, là encore, la vague silhouette de cette Morgane dans le nom de laquelle persiste le parfum de la mer ? Morgane la Sage, Morgue la Fée, Morgain, Morgan, sous toutes ces dénominations, elle est reconnaissable, et l’on a cru deviner une similitude entre ces noms mystérieux, attribués à la fée, et celui que saint Comgall, en la baptisant, donne à l’héroïne d’une légende irlandaise : Murgen, enfant de la mer, ou Muirgelt, folle de la mer. On la croit d’origine celtique. Peut-être descend-elle de quelque