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Page:Fétis - Biographie universelle des musiciens, t1.djvu/116

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RÉSUMÉ PHILOSOPHIQUE

rhythme à la mesure ternaire de la musique moderne. Il a été copié en cela par Laborde et quelques autres historiens, qui ne voient jamais que de la musique moderne lorsqu’ils s’occupent de l’antiquité[1]. Puis est venu Bonesi qui, dans son Traité de la mesure (p. 138), a conservé la quantité indiquée par Burette, mais l’a appliquée à la mesure à deux temps, et de plus a complètement altéré la mélodie. De tous les auteurs qui ont publié le fragment dont il s’agit, Marcello est le seul qui l’a donné tel qu’il est dans les manuscrits, sauf quelques altérations qui appartiennent peut-être à l’ancien copiste. Je donne ici ce morceau (voyez les exemples de musique) d’après le manuscrit de la Bibliothèque du Roi, coté 2-458, in-folio[2]. Il me paraît plus correct et plus conforme au caractère de la tonalité lydienne que tous ceux d’après lesquels cet hymne a été publié, bien que la mélodie des six premiers vers y manque, comme dans tous les autres manuscrits, et que la fin n’y soit pas, tandis qu’elle se trouve dans ce que Marcello nous a fait connaître[3]. J’ai suppléé cette fin par l’exemple de cet auteur.

Examinons avec attention ce singulier fragment pour y découvrir l’analogie de sa tonalité avec celle de notre musique : nous ne tarderons pas à acquérir la conviction que nos efforts sont vains. La première ligne nous indique bien notre ton de fa dièse mineur, mais, dès la seconde ligne, le sentiment de ce ton disparaît, et la finale de cette phrase mélodique ne nous fournit plus aucune indication positive d’un ton quelconque. Le vague augmente encore à la troisième ligne dont les trois dernières notes sont complètement étrangères aux tons de la ou de majeurs que semblent indiquer les premières. Quant à la suite, la tonalité y flotte sans cesse de manière à ne nous laisser jamais le sentiment d’un ton permanent, ou d’une modulation enchaînée de tons analogues.

Ici se présente le moment opportun pour examiner la question de l’existence de l’harmonie dans la musique grecque ; question qui a long-temps di-

  1. Laborde, Essai sur la Musique, t. 1, p. xvi.
  2. Cet hymne se trouve noté avec le dithyrambe à Calliope et l’hymne à Némésis, à la suite d’une partie du Traité de Musique de Bacchius l’ancien, qui n’a point été publiée avec le reste, par Meibomius, bien que ce savant en eût eu connaissance et qu’il eût promis dans sa préface de la donner au public. Il y a une lacune dans le chant de l’hymne à Apollon : j’y ai suppléé par le manuscrit no 5221.
  3. Marcello, Salmo 17, t. 3e, édit. Venez.