Aller au contenu

Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/180

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il avait reconnu son assassin.

La bande joyeuse s’éloignait, chantant et criant :

— Joulou est comte ! Pleurons le père de Joulou ! Joulou hérite ! Joulou nous recevra tous dans son château de Bretagne ! Vive Joulou ! le roi des brutes !

Et comme les clameurs continuaient au lointain, le nom de Marguerite Sadoulas frappa les oreilles de Roland.

Il fut longtemps à se relever cette fois, et sa pensée resta vacillante dans son cerveau. La fièvre revenue l’énervait. Minuit approchait quand il arriva devant la maison de sa mère.

Ici, c’était le quartier des écoles, et les folies de la mi-carême allaient bon train.

La porte se trouvait être grande ouverte ; on laissa Roland monter sans l’interroger. Il compta quatre étages, et Dieu sait si cette ascension fut une torture ! Sa poitrine le brûlait ; chaque marche à franchir lui coûtait un mortel effort. Quand il fut sur le carré du quatrième étage, un sentiment irrésistible le poussa vers le seuil de l’appartement de sa mère.

Il se crut fou. Derrière cette pauvre porte où l’on souffrait silencieusement et saintement, il y avait un bruit de bombance : des cliquetis de verres et de fourchettes, des éclats de voix, des rires et des chansons.

Il se crut fou. Pour mieux dire, il espéra que sa fièvre, atteignant au délire, le trompait.

Ou bien, c’était un pur mécompte : sa mère demeurait au-dessus.

Mais il reconnaissait si vivement cette trace lumineuse que la lampe dessinait sous la porte !

Et d’ailleurs la chambre de la voisine était là, avec la carte clouée qui disait son nom, selon les mœurs du pays latin.

Une terreur vague et profonde envahit