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Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/19

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diverses sortes : aboiements de chiens, plaintes de guitares, sons de casseroles descendaient l’escalier avec une vigoureuse odeur de cuisine. Roland monta la première volée et heurta du doigt un huis fort décent.

— Qui demandez-vous ? cria-t-on de l’intérieur.

C’était une voix de femme, demi-couverte par les jappements de plusieurs chiens.

— Maître Deban, notaire.

— Je sais bien qu’il est notaire, répliqua la voix. La paix, vermine de caniches !… Quelle heure est-il ?

— Quatre heures et demie.

— Merci. Montez. Il y a des clercs, en haut.

Roland monta ; au second étage, une furieuse guitare raclait pardessus une grosse voix qui chantait :

Brune Andalouse, ô jeune fille
De Séville,
Je suis l’hidalgo de Castille
Dont l’œil brille,
Je sais chanter une gentille
Seguedille…

— Holà ! cria Roland après avoir inutilement frappé. Maître Deban !

— Quelle heure est-il ? demanda la voix toujours accompagnée par la guitare.

— Quatre heures et demie.

— Satanas ! Alors, il faut que je m’habille… Est-ce pour affaires que vous demandez maître Deban ?

— Pour affaire pressée.

— Montez ; il y a des clercs en haut.

Roland monta, mais en pestant. Et de fait, c’était là une singulière étude. Mais souvenez-vous que Paris était malade et fou. Il avait la Tour de Nesle, compliquée par un reste de guitare mal guérie qui roucoulait encore entre deux hoquets du XVe siècle : mantille, Castille, charmille…