Aller au contenu

Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/22

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vieilles vogues. Ce doux nom évoquait évidemment Ermenonville, les grottes de Bernardin de Saint-Pierre, les peupliers de Jean-Jacques Rousseau, l’être suprême, la paix de l’âme et les cœurs sensibles.

Corbœuf ! Il aurait fallu l’appeler la Taverne, quand vinrent les dagues de Tolède et les rotules cagneuses, quitte à la nommer plus tard le Tapis-Franc. Je sais une respectable compagnie qui s’est intitulée tour à tour : la Royale, la Républicaine et l’Impériale. Voilà du savoir-vivre !

Quand les talons du dormeur touchèrent le carreau, il se fit un grand bruit d’éperons de théâtre. Une allumette plongea au fond d’un briquet phosphorique et s’enflamma.

Déjà Roland se disait, car il était bon comme le bon pain, ce beau garçon-là :

— Il y a mille ou douze cents Marguerite dans Paris… De quoi diable vais-je m’occuper ?

Une bougie brilla, éclairant une mansarde assez vaste, où tout était sens-dessus-dessous. Au milieu de la chambre, Buridan était debout : un charmant Buridan à la taille leste et bien prise, à la tête correcte et intelligente. Il portait à ravir toute sa friperie moyen-âge ; sa joue pâle faisait merveille sous ses énormes cheveux aplatis à la mal-content, et sa fine lèvre avait bien l’ironique sourire qui est de rigueur.

Il était seulement un peu trop jeune, ou trop vieux. Ce n’était ni le Buridan du cachot, frisant la quarantaine et parlant amèrement du passé lointain, ni le Buridan des premières amours, Lyonnet de Bournonville, page du duc de Bourgogne. Il était entre le prologue et la pièce ; il avait vingt-quatre ou vingt-cinq ans. Roland ôta, ma foi, son chapeau. Buridan le regarda et sourit :