Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/24

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rites. Je connais une Marguerite, et un madras tout pareil à celui-là, qui appartient à cette Marguerite. C’est justement pour cela que je vous demandais son nom.

Buridan réfléchit et répondit en posant son bougeoir sur la table de nuit, pour avoir les mains libres à tout événement :

— Elle se nomme Marguerite Sadoulas.

La pâleur de Roland devint plus mate.

— Je vous remercie, Monsieur Léon Malevoy, dit-il, je ne voudrais pas vous insulter, car vous êtes un jeune homme poli…

Mais, s’interrompit-il avec une violence soudaine, vous avez volé ce madras à Marguerite ; c’est mon idée !

Il y eut de la pitié dans le sourire de Buridan.

— Ne vous battez pas pour cette belle fille-là, mon garçon, croyez-moi, murmura-t-il. Tirez-vous bien l’épée ?

— Assez bien. Et j’y pense, ce sera drôle ! J’ai, moi aussi, un costume de Buridan… un beau ! Dansez-vous cette nuit ?

— Je danse et je soupe.

— Il y a temps pour tout. Voulez-vous que nous fassions un tour, demain matin, derrière le cimetière Montparnasse ?

— Quel âge avez-vous ? demanda Buridan avec hésitation.

— Vingt-deux ans, répondit Roland qui se vieillissait à dessein.

— Vraiment ? Vous n’avez pas l’air. Comment vous appelez-vous ?

— Roland.

— Roland, qui ?

— Roland tout court.

— Va pour le cimetière Montparnasse, dit le Buridan, qui reprit son bougeoir. Je vais vous éclairer, Monsieur Roland tout court.

— C’est bien convenu ?

— Bien convenu. Mais le diable m’emporte si Marguerite…