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LES MOLLY-MAGUIRES.

Auprès du lit, sur une chaise en forme de baquet, une jeune fille au visage doux et beau avait la tête renversée et les yeux fermés. Elle était là pour veiller le blessé sans doute, et le sommeil vainqueur l’avait surprise au milieu de sa pieuse fatigue.

En dormant, elle souriait ; un beau rêve la réjouissait peut-être, et son âme de vierge envoyait des reflets purs à son front.

Le blessé avait les yeux ouverts. Ses traits, éclairés vaguement par la lumière lointaine, étaient réguliers et nobles, mais il y avait dans son regard une torpeur morne qui ressemblait au dernier sommeil.

Ses bras et sa poitrine étaient hors des couvertures ; sous sa chemise fine et transparente, on apercevait, au sein droit, des linges tachés de sang.

Ses mains étaient incolores comme des mains de cadavre ; son visage, pâle et immobile, ne gardait d’autre signe de vie que le souffle faible passant à travers ses lèvres blanches entr’ouvertes.

L’homme au carrick avait son voile noir sur à figure. Il s’avança doucement jusqu’au lit ; ne bougea point ; la jeune fille ne s’éveilla pas