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DEUXIÈME PARTIE

litaire du comté de Clare, qui le surveillait incessamment et donnait à chacun de ses efforts une interprétation mauvaise.

Il avait contre lui les orangistes stupides, les protestants plus éclairés, les autorités jalouses, les repealers dont il contrôlait les assemblées, les Molly-Maguires qu’il combattait à outrance, et jusqu’à ses propres officiers, dont l’intelligence subalterne ne comprenait point sa pensée.

Ceux-ci avaient noué avec Brazer une sorte de tacite et perfide alliance. Mortimer était menacé d’en haut et d’en bas à la fois. Il ne fallait point qu’il trébuchât en sa route, car des mains étaient là, prêtes à hâter sa chute comme à l’empêcher de se relever.

Il était seul, absolument seul contre tous. Autour de lui, si loin que pussent aller ses regards, il voyait des haines amoncelées.

Chacun, fort ou faible, lui faisait obstacle dans la mesure de son pouvoir. C’étaient tous les jours cent combats grands ou petits, des coups d’épée et des coups d’épingle. Une nature aussi robuste que la sienne, mais plus fougueuse, y eût perdu le souffle. Pour ne point devenir fou à cette tache, il fallait sa patience froide et son calme inaltérable.

L’homme et la mission se convenaient. La