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LES SAXONS.

On se pressait ; des hommes renversés criaient sous le pied qui foulait leur poitrine ; on se ruait avec une fougue désordonnée. La ronde immense allait, choquant les piliers immobiles et s’écrasant contre les aspérités des parois.

C’était un cordon sans fin qui passait et repassait devant le foyer où le Brûleur jetaient incessamment de nouvelles branches de bog-pine.

En passant, les faces échevelées s’éclairaient de rouges reflets, et allaient se plonger, comme en un gouffre sans fond, dans l’ombre voisine.

D’autres s’élançaient du sein de la nuit, s’éclairaient et disparaissaient à leur tour.

Et toujours, toujours…

La tête et la queue de ce branle diabolique se mariaient dans les ténèbres. Jamais de cesse ! Les têtes passaient, passaient, jetant leurs longs cheveux en arrière en montrant leurs faces démasquées. Et chacun mêlait son cri aigu ou grave à la clameur commune.

Les voix s’enrouaient, les jambes s’épuisaient ; mais on chantait, mais on dansait toujours.

Un cri s’éleva plus rauque. La foule essoufflée trouva pour y répondre un long éclat de rire.

Des bras s’élevèrent ; le lourd Mahony, saisi par trente mains à la fois, fut enlevé péniblement,