Aller au contenu

Page:Féval - La Quittance de minuit, 1846 - tome 3.djvu/144

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
138
TROISIÈME PARTIE.

ques pages, et l’écriture en était visiblement changée ; les caractères devenaient mal assurés ; la main de Jessy avait tremblé en les traçant.

« Deux semaines se sont écoulées, disait-elle, depuis que je n’ai causé avec vous, Morris.

« J’étais trop faible ; la fièvre me retenait clouée sur ma couche ; j’aurais bien voulu vous écrire, car cela me soulage et me fait du bien, mais je ne pouvais plus.

« C’est bien long, deux semaines ! quinze grands jours ! Il me souvient qu’une fois, au temps où j’étais heureuse, je fus obligée de garder le lit durant un mois à la ferme de notre père…

« Ô Morris ! quel doux mal que celui qui attire autour de notre couche tous ceux que nous aimons !

« Nuit et jour il y avait quelqu’un auprès de moi pour s’enquérir de ma souffrance, et m’encourager, et me consoler. La noble heiress s’asseyait au pied de mon lit ; elle me servait, moi, pauvre fille, comme si j’eusse été son égale… Que Dieu la bénisse !… Je n’ai jamais oublié son digne cœur… et quand je vais aller vers Dieu, je lui parlerai d’elle… Notre père venait aussi bien souvent. Qu’il est bon, Morris ! et qu’il y avait pour nous tous de tendresse en son âme !…