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Page:Féval - La Tache Rouge, volume 1 - 1870.djvu/17

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LA TACHE ROUGE

Elle prit sa route par le pont ; son allure était le trot, un trot sautillant et vaillant.

Quel âge, maintenant que la voilà cheminant sous le gaz ?

Quinze ans ou soixante ?

Elle trottait à miracle ; elle avait ce pied parisien qui effleure la pointe des pavés et voltige à une demi-ligne au-dessus de la boue.

Sa personne en chair et en os était, comme son ombre, grêle et frêle.

Tout cela est la jeunesse.

Au coin du pont, le chiffonnier qui l’entendait venir mit son crochet au port d’armes et dit avec un sourire amical :

— À nous deux, nous valons bien l’horloge, c’est sûr ; nous sonnons quatre heures, quatre heures un quart quand nous nous croisons ici au coin. Avez-vous pensé à jeter vos affaires au tas, ma bonne dame ?

— Vous allez vous coucher et moi je me lève, père Loisel, répondit la petite femme sans s’arrêter ; j’ai mis les affaires auprès du tas, à part ; il y a de bons os ; et les croûtes sont proprement dans du papier.

— Un amour, quoi ! murmura le père Loisel, en la regardant s’éloigner.

Et il ajouta :

— C’est drôle les ressemblances ! il y a bien longtemps