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Page:Féval - La Vampire.djvu/107

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LA VAMPIRE

dans la main de Giuseppe Ceracchi, jeune sculpteur déjà célèbre, dont elle avait enivré l’âme chevaleresque. Aréna, Demerville et Topino-Lebrun avaient juré que Bonaparte ne verrait pas la fin de la représentation des Horaces, qu’on donnait ce soir-là.

Un billet d’une écriture inconnue prévint le général Lannes.

J’ai pleuré sur la mort de Ceracchi. — Mais Bonaparte fut sauvé.

Trois mois après, le 24 décembre, au moment où le carrosse du premier consul tournait le coin de la rue Saint-Nicaise pour prendre la rue de Rohan qui devait le conduire à l’Opéra, un jeune garçon cria au cocher : « Au galop, si tu veux sauver ta vie ! »

Le cocher épouvanté fouetta ses chevaux, qui franchirent dans leur course rapide, un obstacle placé en travers de la voie.

L’obstacle était la machine infernale ! Faut-il vous dire qui était le jeune garçon ?

Depuis lors j’ai veillé.

Je vous donne ici le secret de ma vie, René, car je ne me défendrais pas contre ma sœur. D’un mot vous pouvez me perdre.

En combattant ma sœur, j’ai sans cesse sauvegardé ses jours. Je ne l’aime pas ; elle m’épouvante, mais elle reste sacrée pour moi et je me coucherais en travers du seuil de la chambre où elle dort pour garantir son sommeil.

Avant d’être arrêtés, Moreau et Pichegru ont reçu des avertissements : c’est moi qui les ai avertis.

Ils ont passé outre, ils se sont perdus.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

— Que voulez-vous de moi ? demanda René de Kervoz après un long silence.

— Le moyen de sauver le frère de votre mère, sans compromettre la sûreté du premier consul. Je veux avoir une entrevue avec Georges Cadoudal.

René resta muet.

— Vous n’avez pas confiance en moi, murmura Lila avec tristesse.

— J’aurais confiance en vous pour moi, répliqua le jeune Breton. Ce que vous avez fait jusqu’ici est bien fait, et dans votre histoire que j’ai écoutée sans en perdre une parole, j’ai vu l’énergie d’une âme droite et haute. Mais les secrets de mon oncle ne m’appartiennent pas.

Elle se leva souriante.

— Qu’il en soit donc selon votre volonté, dit-elle. J’ai donné