une mouche, monsieur le baron !… C’est maintenant un négociant sage et respectable, mais il doit avoir sa vieille lame quelque part dans un coin de son bureau… Quant à nous, il est certain que nous nous défendrons de notre mieux, n’est-ce pas docteur ?
— Oui, répondit Mira.
— Et, tout d’abord, poursuivit le chevalier, nous profiterons de notre prochain voyage en Allemagne pour recommander ces messieurs à l’autorité militaire de Francfort et les faire garder à vue comme des bêtes rares.
Le chevalier avait retrouvé toute sa gaieté.
— Bonne idée ! dit Abel.
— Je n’ai que de bonnes idées, mon jeune ami, répliqua-t-il en riant ; — et pour preuve, en voici une autre qui est excellente.
— Voyons-la !
— C’est de demander l’appui de M. le baron en cas de guerre et de conclure avec lui, contre les bâtards, une ligue offensive et défensive.
— Bravo ! s’écria Abel de Geldber.
— Monsieur le baron, reprit Reinhold qui suivait son idée, ayant la possibilité d’entretenir avec ces Messieurs des relations à peu près amicales, nous pourrions être instruits de leurs projets à l’avance et déjouer leurs stratagèmes… Qu’en dit monsieur le baron ?
Rodach sembla hésiter.
— La chose répugne peut-être à sa loyauté ? reprit Reinhold ; — mais je lui ferai observer qu’en bonne morale, tout est permis contre des assassins.
Une lueur passa dans le regard du baron.
— Tout est permis contre des assassins, répéta-t-il de sa voix lente et grave ;— vous avez bien raison, monsieur de Reinhold, et vous me décidez… d’ailleurs votre ruine serait désormais ma ruine ; ainsi, pour cela comme pour autre chose, vous pouvez compter sur moi.
Le chevalier se frotta les mains ; Abel rendit grâces au nom de son père, et don José grommela une manière de remerciement.
Trois heures sonnèrent à la pendule ; Abel et Reinhold se levèrent à la fois.
— Monsieur le baron voudra bien m’excuser, dit le jeune de Geldherg,