Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/152

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Je vois là-bas un homme dont j’aurai de la peine à éviter les regards.

— Lequel ? demanda Didier en s’approchant de la fenêtre : Lapierre ?

— Je ne sais s’il a changé de nom, mais on l’appelait de mon temps maître Alain. C’est le plus vieux des deux.

— À la bonne heure ! Et c’est celui-là que tu nommais hier ton ennemi ?

— Celui-là même.

— Eh bien ! mon garçon, l’autre est le mien.

— Un valet, votre ennemi ?

— Cela t’étonne ? Faut-il donc te répéter que je ne suis point gentilhomme ? Ce valet est le seul être au monde qui sache le secret de ma naissance. Il ne veut pas le dire et c’est son droit. Il prétend m’avoir autrefois servi de père… Tu vois bien ceci ?

Didier, qui n’était pas encore vêtu, écarta sa chemise et montra par-derrière, à la naissance de l’épaule, une cicatrice encore récente.

— C’est une blessure faite traîtreusement et par la main d’un misérable, dit Jude en fronçant le sourcil.

— Tu t’y connais, mon garçon. J’ai tout lieu de croire que le misérable est cet homme : mais si je ne suis pas noble, je suis soldat, et ma main ne s’abaissera point volontiers jusqu’à lui.

— Moi je suis un valet, dit Jude avec froideur ; prononcez un mot et je le châtie.

— Voilà que tu oublies Georges Treml ! s’écria Didier en souriant. Sur mon honneur ! il y a de la fine fleur