Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/197

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Jude devinait juste. Ces ruines étaient l’œuvre des agents du fisc, secondés, il faut le dire, par quelques gentilshommes du pays rennais, parmi lesquels Hervé de Vaunoy se distinguait au premier rang.

M. de Pontchartrain, premier intendant royal, et, après lui, M. de Béchameil, marquis de Nointel, ayant pris, suivant la coutume, à forfait la levée de l’impôt breton, avaient un intérêt évident à ne laisser aucune partie de la province se prévaloir d’une exception uniquement fondée sur l’usage. Ils voulurent forcer les gens de la forêt à solder leur part des tailles, et ne reculèrent devant aucune extrémité pour en venir à leurs fins.

C’était ce que Jude appelait demander la bourse ou la vie.

Quant aux gentilshommes, leur intérêt était autre, mais également évident.

Les hommes de la forêt, disséminés sur les divers domaines qui formaient la majeure partie de cette énorme tenure, prétendaient droit d’usage gratuit et grevaient par le fait ces domaines d’une véritable et lourde servitude.

Tant que Nicolas Treml avait vécu, comme il possédait, lui seul, autant et plus de biens que tous les autres gentilshommes ensemble, ces derniers s’étaient modelés sur lui. Or, Treml était un vrai seigneur, doux au faible, rude au fort, et plus disposé à faire l’aumône à ses voisins qu’à leur disputer le chétif soutien de leur existence.

Vaunoy avait pris sa place et mis sa lésinerie de gentillâtre dans toutes les affaires que son cousin avait traitées en gentilhomme. Les propriétaires des alentours,