Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/200

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

de loup. De là le surnom qu’on leur donna d’abord comme un méprisant sobriquet, et qui, peu de mois après, était prononcé avec terreur dans tout le pays de Rennes.

Les choses subsistèrent ainsi pendant des années, avec diverses chances de succès et de revers pour les Loups, mais sans que jamais les troupes du gouvernement pussent entamer le centre de leurs opérations.

Depuis un temps assez long, les gentilshommes du voisinage avaient conclu avec la forêt une sorte de trêve tacite, et l’intendant royal, découragé, avait discontinué ses efforts. Mais Béchameil, six mois avant l’époque où commence notre histoire, eut la malencontreuse idée de recommencer les hostilités.

L’explosion fut terrible.

Presque toutes les loges devinrent désertes le même jour. Charbonniers, tonneliers, vanniers, etc., se rassemblèrent et coururent à la retraite permanente du noyau de l’affiliation.

Là ils trouvèrent, comme toujours, des chefs et des armes ; le lendemain, la révolte était de nouveau aux portes de Rennes ; le surlendemain l’hôtel de l’intendant royal était au pillage.

En conscience, il fallait bien que les gens de la forêt trouvassent leur vie quelque part. Ils avaient pour eux la prescription que nos codes rangent au nombre des « manières d’acquérir la propriété », non pas la prescription de cinq ans qui achète les meubles, non pas même la prescription trentenaire qui conquiert les immeubles, mais une prescription plusieurs fois centenaire !