Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/213

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Et a-t-il conservé la mémoire des faits depuis longtemps passés ?

— Il se souvient de tout.

— Il faut que je le voie ! s’écria Jude.

Un tremblement agita le corps de Pelo Rouan.

— Voir Jean Blanc ! dit-il d’une voix étrange ; il y a bien longtemps que personne n’a pu se vanter de l’avoir rencontré face à face. Croyez-moi, contentez-vous de m’interroger moi-même et ne cherchez pas à rejoindre Jean Blanc.

— Mais il me dirait peut-être…

— Rien que je ne puisse vous apprendre.

— Vous n’êtes pas dans sa peau, que diable ! s’écria Jude que l’impatience reprenait.

— Il m’a tant de fois ouvert son cœur et ses souvenirs ! répondit le charbonnier avec douceur. Écoutez. Voulez-vous que je vous raconte le lâche assassinat de l’étang de la Tremlays ? J’en sais les moindres circonstances. Il me semble voir l’infâme Hervé de Vaunoy.

— Contez ! contez ! interrompit Jude avidement ; je ne hais pas encore assez cet homme.

Pelo Rouan raconta dans le plus minutieux détail le meurtre infâme dont Vaunoy s’était rendu coupable sur la personne d’un enfant de cinq ans, petits-fils de son bienfaiteur. Il parla longtemps, et Jude l’écouta constamment avec une religieuse attention. La mort de Loup, le chien fidèle, arracha une larme au vieil écuyer et l’arrivée de l’albinos, sautant au milieu de l’étang pour sauver le petit Georges, lui fit pousser un cri d’enthousiasme.