Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/214

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— Après ! après ! dit-il en retenant son souffle ; que Dieu récompense le pauvre fou ! Après ?

Pelo reprit son récit. En arrivant à l’accès de délire qui saisit Jean Blanc dans la forêt, sa voix faiblit et chevrota comme la voix d’un homme qui se retient de pleurer.

— Jean abandonna l’enfant, dit-il. Quand il revint, il n’y avait plus sur le fossé que la veste de peau de mouton qui était en ce temps-là son vêtement ordinaire. Il tomba sur ses genoux. Il pria Dieu… Dieu et Notre-Dame… il pleura…

Jude haussa les épaules avec colère.

— Il pleura des larmes de sang ! reprit Pelo Rouan dont un sanglot souleva la poitrine et, quand il parle de cette affreuse soirée, il pleure encore, car le souvenir de Treml vit au fond de son cœur.

— Mais pourquoi ne pas courir, chercher ?…

— Son esprit, en ce temps, était bien faible, et ses crises le laissaient brisé. Il resta jusqu’au lendemain matin affaissé sur le sol, sans force et sans pensée. Le lendemain, il courut, il chercha, mais il était trop tard, et il ne trouva point.

— Et nulle trace depuis lors ? aucun indice ?

— Rien.

Pelo Rouan prononça ce dernier mot d’un ton découragé.

Jude, qui jusqu’alors avait dévoré chacune de ses paroles, laissa retomber ses bras le long de son corps, et courba la tête.

— Rien, répéta-t-il ; mais alors il n’y a donc plus d’espoir ?