Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/221

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pas son vieux serviteur. Ce fut moi qui jetai la bourse au seuil de la loge.

Pelo Rouan parut ne point prendre garde à cette interruption.

— Lorsque Jean arriva dans la cabane, poursuivit-il, ses forces défaillaient, tant son émotion était navrante. Il avait le pressentiment d’un cruel malheur. Vous connaissiez Mathieu Blanc, ami Jude ; ç’avait été un homme vaillant et fort, mais la souffrance pesait un poids trop lourd sur les derniers jours de sa vie.

« Ce n’était plus, au temps dont je parle, qu’un pauvre vieillard, toujours couché sur son grabat, miné par la maladie, stupéfié par les progrès lents et sûrs d’une mort trop longtemps attendue. En entrant, Jean lui donna un baiser, suivant sa coutume, et le vieillard lui dit :

« — Je souffre moins, Jean mon fils.

« Une autre fois, Jean se fût réjouit, car il aimait bien son père, mais il songea aux cavaliers qui sans doute en ce moment galopaient vers la loge, et il frémit de rage et de peur.

« La bourse où se trouvait le restant des pièces d’or de Treml était sur la table. Jean n’eut pas même l’idée de la cacher. Ce qu’il cacha, ce fut le vieux mousquet dont se servait son père au temps où il était soldat.

« Une bonne arme, mon homme, portant loin et juste ! Jean la jeta dans les broussailles, au-dehors, avec la poire à poudre et les balles.

« Puis il revint s’asseoir au chevet de son père.