Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/227

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« Aussi à chaque coude du chemin, le vieux mousquet faisait son devoir. C’était une bonne arme, je te l’ai déjà dit, et Jean Blanc tirait juste.

« À chaque détonation qui ébranlait la voûte du feuillage, un homme chancelait sur son cheval et tombait. Jean Blanc les chassait au bois, et pas une seule fois il ne brûla sa poudre en vain.

« De temps en temps, ceux qui restaient essayaient de battre le fourré pour détruire cet invisible ennemi qui leur faisait une guerre si acharnée. Plus d’une balle siffla aux oreilles de Jean Blanc tandis qu’il rechargeait son arme derrière quelque souche de châtaignier ; mais ces efforts n’aboutissaient qu’à retarder la marche des soldats. Aussitôt qu’ils avaient regagné la route, un coup partait, un homme mourait. »

— Par le nom de Treml ! s’écria Jude qui s’exaltait de plus en plus au récit de cette sauvage vengeance ; je n’aurais jamais cru le pauvre Mouton-Blanc capable de tout cela. Sur ma foi ! c’est un vaillant garçon après tout ! Mais Vaunoy ? n’essaya-t-il point de tuer ce mécréant de Vaunoy ?

« — Attends donc ! Jean Blanc n’oubliait point Vaunoy, mon homme ; il faisait comme ces gourmands qui gardent le plus fin morceau pour la dernière bouchée ; il gardait Vaunoy pour la bonne bouche.

« Le moment vint où le dernier soldat vida la selle et se coucha par terre comme ses compagnons. Jean Blanc avait tué huit hommes et un collecteur des tailles. Il ne restait plus que Vaunoy.

Celui-ci, plus mort que vif, poussait furieusement son cheval, rendu de fatigue. Jean Blanc mit deux balles dans son fusil et s’en alla