Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/231

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Pelo Rouan prit sa main et la secoua brusquement.

— Et le service du capitaine Didier ? demanda-t-il.

— Après le service de Treml : c’est convenu entre le capitaine et moi.

— Prends garde ! dit Pelo Rouan avec sévérité, prends garde de confier à un Français le secret d’un Breton !

— Il est bon, il est noble ; je réponds de lui.

— Il est noble et bon à la façon des gens de France, répartit amèrement le charbonnier. Mais, encore une fois, la guerre qui existe entre cet homme et moi ne te regarde pas. Je continue :

« Quand Jean Blanc revint à la Fosse-aux-Loups, il oublia Treml et tout le reste pour s’abîmer dans sa douleur. Pendant deux jours, il coupa du cercle sans relâche, et le vieux Mathieu eut une tombe chrétienne.

« Ce devoir accompli, Jean Blanc ne voulut point retourner à la loge, dont les ruines lui rappelaient de si navrants souvenirs. Il traversa toute la forêt et alla se cacher sur la lisière opposée, de l’autre côté de Saint-Aubin-du-Cormier.

« Il allait seul par les futaies, toujours triste, et plus que jamais frappé par la main de Dieu, car sa folie, en se retirant, avait laissé des traces cruelles. Jean Blanc était atteint de cet horrible mal qui effraie la foule et repousse jusqu’à la pitié ; il était épileptique.

« Ce fut au milieu de cette souffrance morne et sans espoir que vint le chercher le bonheur, un bonheur si grand qu’on n’en peut espérer de plus complet qu’au ciel même, mais un bonheur bien court, hélas ! après