Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/235

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— Ce fut vers le même temps, reprit le charbonnier, que je vins m’établir dans cette loge. Pour des motifs que tu n’as pas besoin de connaître, je pris avec moi la fille de Jean Blanc et je l’élevai. Dans son enfance, avec les beaux traits de sa mère, elle avait les blancs cheveux du pauvre albinos, mais l’âge a mis un reflet d’or aux boucles brillantes qui encadrent le front gracieux de la fleur de la forêt : elle n’a plus rien de son père ; elle est belle.

« Que te dirais-je encore ! Tu es dans le pays depuis hier, tu as dû entendre parler des Loups. C’est le premier mot qui frappe l’oreille du voyageur à son arrivée dans la forêt ; c’est le dernier qu’il entend à son départ.

« Les cupides hobereaux, qui, pour gagner quelques cordes de bois ont voulu arracher le pain à cinq cents familles, tremblent maintenant derrière les murailles lézardées de leurs gentilhommières. Non-seulement les gens du roi ne se risquent plus guère dans la forêt, mais cet épais gourmand qui tient maintenant la ferme de l’impôt, Béchameil, regarde à deux fois avant d’envoyer à Paris le produit de ses recettes : la forêt est entre Rennes et Paris. Les Loups sont dans la forêt. »

— C’est fort bien, dit Jude, les Loups sont de redoutables camarades, mais ne pourrions-nous pas parler un peu de Treml, et revenir à ce fameux moyen ?…

— Ami, interrompit Pelo Rouan, les Loups et Treml ont plus de rapport entre eux que tu ne penses. Monsieur Nicolas, dont Dieu ait l’âme, fut le dernier gentilhomme breton : les Loups sont les derniers bretons. Quant à mon moyen, si honnête, si bon et si brave serviteur que tu puisses être, on n’a pas attendu ton retour