Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/293

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Vierge ! la mort est sur moi. C’est la première fois que j’ai peur !

Le malheureux vieillard tremblait son agonie et avait besoin de ses deux mains pour se retenir aux couvertures du lit. Une minute se passa pendant laquelle il souffrit un martyre que nous n’essaierons pas de dépeindre. Puis ses mains glissèrent lentement le long des couvertures.

— Éveille-toi ! éveille-toi ! râla-t-il. Écoute ! Écoute-moi, notre monsieur ! Il y a dans le creux du chêne de la Fosse-aux-Loups un parchemin et de l’or. Tout cela est à vous, Georges Treml… à vous ! moi, je suis un mauvais serviteur : je meurs quand vous auriez besoin que je vive. Pardonnez-moi !… pardonnez-moi ! Treml ! Treml !

Ses jambes fléchirent ; il tomba pesamment à la renverse en prononçant une dernière fois le nom idolâtré de son maître.

Un silence de mort régna dans la chambre pendant quelques minutes. La lanterne, demeurée sur le lit, jetait encore par intervalles de tristes lueurs sur cette scène de désolation.

Tout à coup on entendit un long et retentissant bâillement.

L’un des cadavres s’agita et se mit à étirer ses membres, comme on fait après un bon sommeil.

Ce cadavre était celui de maître Alain, le majordome, lequel n’avait d’autre blessure qu’un large trou fait à son pourpoint. Le vieux buveur était tombé au choc de Jude, et, moitié par frayeur, moitié par ivresse, il ne s’était point relevé.