Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/77

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quelque jour. Un mois, deux mois se passèrent. Hervé avait fait maison nette de tout ce qui portait amour au vieux sang de Treml. Néanmoins il y avait un fidèle serviteur qu’il n’avait point pu chasser : c’était Loup, le chien favori de M.  Nicolas.

En vain les nouveaux valets, armés de fouets, avaient poursuivi Loup jusqu’à une grande distance dans la forêt, il revenait toujours. Au moment où Hervé le croyait bien loin, il le retrouvait, le soir, assis auprès du berceau de Georges endormi. Le chien veillait, et nous ne pouvons point affirmer que, sans la présence de ce vaillant gardien, l’héritier de Treml eût passé ses nuits sans péril, car M.  de Vaunoy jetait souvent d’étranges regards sur la couche où reposait son jeune cousin.

Loup n’était pas seul à veiller sur le petit Georges : un autre protecteur couvrait l’enfant de sa mystérieuse vigilance. Avec la bourse de Nicolas Treml, Jean Blanc avait soulagé les souffrances de son père. Il ne travaillait plus : le jour, il dormait ou rôdait autour du château ; la nuit, il montait dans l’un des arbres du parc, dont les longues branches venaient frôler les fenêtres de la chambre où dormait Georges, et là il faisait sentinelle jusqu’au matin.

Hervé l’avait bien menacé parfois du fusil de son veneur, mais Jean Blanc savait courir sur la verte couronne des arbres comme un matelot dans les agrès de son navire. Il ne craignait point les balles, seulement, il se garait, ne voulant point mourir, puisqu’il avait dit : Qui vivra verra !

Pour voir, il voulait vivre.