Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/50

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car chacune de ses paroles est restée dans ma mémoire. Et je te l’ai dite, chérie, parce que l’histoire a une fin qui venge bien ma noble protectrice, la comtesse de Pardaillan. Si tu savais comme ce Gaëtan était beau en disant à M. de Gondrin : « Vous mentez ! » Et si tu savais… Oui, il faut que je mentionne cela, car aussi bien j’aurai à te parler encore de ce personnage singulier, le More : un visage de bronze parmi les masses fauves de sa barbe et de ses cheveux… Si tu savais comme le More écoutait, et quelle lueur farouche glissait entre ses paupières…

— Cet homme est donc méchant ? dit Pola qui frémissait malgré elle.

— Je ne saurais le dire. Il n’a commis, que je sache, aucune action mauvaise ; au contraire. Et cependant, il me fait peur.

— Alors, il est bien laid ? demanda Pola, dont l’accent était d’un enfant.

— Lui ! le More ! s’écria Mélise. Il est plus beau que Roger. Il est plus beau que Gaëtan. En toute ma vie, je n’ai jamais vu un homme si beau !

— Il est jeune ?

— Il est beau, te dis-je. Une semblable beauté n’a point d’âge. Si Roger l’avait vu chez mon père, je suis sûre que Roger m’aurait tuée !

— Ah ! fit mademoiselle de Pardaillan, il a été chez ton père ?

— Je t’ai dit que j’avais encore à te parler du More. Laisse-moi suivre le fil de mon récit, ou bien je m’y perdrai. Quand j’eus écouté l’infâme histoire de ce baron de Gondrin, tu devines dans quel état j’étais. Je courus trouver mon père toute