Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/55

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Dès le premier mot que je prononçai, il demanda du vin, lampa une maîtresse rasade, ceignit son épée et partit comme un trait.

Quand il revint, il me cria de loin joyeusement :

— N’aie pas peur fillette. Je suis arrivé trop tard ; ce Moricaud d’Estéban avait déjà fait l’affaire. Où diable ai-je donc vu autrefois la figure de ce luron-là ?

Il faut te dire que mon père ne prononçait point ces paroles pour la première fois.

Quelque temps auparavant, un soir, j’avais vu entrer chez nous un homme vêtu bizarrement et qui m’était inconnu.

Pour arriver ainsi à notre réduit, tout droit, la nuit, le long des corridors de Vendôme, il faut avoir un guide, savoir les êtres ou être sorcier.

L’étranger venait pour la première fois à l’hôtel et n’avait point eu de guide.

Il s’assit après m’avoir saluée et sans me demander aucune permission. Quand il fut assis, il me dit :

— Je vais attendre le retour du capitaine Mitraille. J’ai besoin de m’entretenir avec lui.

Moi, je ne suis pas très embarrassée, tu sais. Je m’ennuyais comme à l’ordinaire. Je répondis n’importe quoi, et tout en faisant semblant de broder, je me mis à considérer cette admirable statue.

Une statue, c’est le mot, et il n’y en a pas beaucoup de pareilles.

Il restait immobile et muet. Il semblait réflé-