Page:Féval - Le chevalier ténèbre, 1925.djvu/127

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hypothèques sur son domaine et emprunté juste la somme qu’il avait prise de trop dans le missel. Et avant même de célébrer le mariage de sa fille, il a déposé notre tirelire entre les mains du primat de Hongrie, tu sais mon oncle, l’archevêque de Gran. On a fait publier la chose à Vienne, à Venise, à Stuttgard, à Paris, partout où nous avions travaillé, et toutes les brebis que nous avions tondues sont arrivées, demandant leur laine !… Un pillage, quoi ! Il n’est pas resté un florin de notre pauvre trésor ! Et il n’y avait déjà plus rien, que les coquins réclamaient encore !

— Les misérables ! gronda William.

— Laisse-moi te dire, poursuivit Bobby. On ne parle que de nous ici, et dès que nous aurons accompli notre besogne, il faudra décamper. Ils savent tout ! On m’a raconté notre histoire de Paris comme une légende. La quête chez l’archevêque a un succès fou. Et le missel lui-même… Mais c’est l’affaire du missel que je veux te rapporter. Le marquis donnait le bras à sa mère, quand il ramassa le missel. Son intention était de me le rendre, mais le missel était tombé de façon si malheureuse que le ressort du secret avait joué. Rien n’était brisé : seulement, le geste qu’on fait pour ouvrir un livre ordinaire suffisait à relever la surtranche d’acier. Le marquis fit ce mouvement, peut-être par hasard, et les deux bank-notes de cinquante mille livres lui sautèrent aux yeux. Il sait l’anglais, et tu avais pris soin de lui apprendre quelques minutes auparavant l’histoire du père de Lénor…

— Je me souviens ! murmura William. Il eut le front de me demander des renseignements sur les rémérés de plein droit ! sous prétexte d’un bien que son aîné possède à Debreczin…

— Quand il te demanda les renseignements, son plan était conçu, reprit Bobby, il voulait épouser nos millions avec sa voisine. C’est un joli garçon, et je ne regretterai pas la balle qui lui cassera la tête.