Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/115

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Ce mot et ce geste pouvaient exprimer une joie très vive, et pourtant il y avait de l’appréhension sur le visage de l’enfant.

— Tu ne te déplais pas ici ? demanda Carpentier.

— Tout le monde est si bon pour moi !

— Certes, certes, mais cela ne t’empêche pas de soupirer après la liberté. Nous sommes tous ainsi. L’existence se passe à regretter ce qu’on a souhaité ardemment de voir finir. Il te faut encore au moins une année, chérie.

— Crois-tu, père ?

Irène avait les yeux baissés.

Vincent, qui pensait plaider une cause très difficile, prit ses belles petites mains et les caressa doucement.

— Au moins une année, répéta-t-il. Je veux que mon Irène soit partout la plus brillante, comme elle sera la plus jolie.

— Si c’est ta volonté, père…

— Sois raisonnable ! Tu seras un peu seule chez nous. On ne s’y amuse pas du matin au soir, sais-tu ? C’est la maison du travail. Je vieillis, il y a des jours où j’ai peur de mourir maniaque. Embrasse-moi. Tu n’es pas fâchée ?

Irène lui donna dix baisers pour un, et ils reprirent, les bras entrelacés, le chemin du couvent.