Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/252

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la galerie Biffi, révélation inattendue, a donné pour moi un sens au texte inexplicable de la légende. Cet or amoncelé en quantité inouïe, c’est du sang, c’est du malheur, ce sont des larmes. Voilà plus d’un siècle peut-être que cet interminable série de crimes passe effrontément devant l’œil aveuglé de la justice humaine et brave sans cesse le châtiment. Il y avait des francs-juges autrefois. Ce n’étaient pas des voleurs. Ils avaient pris leur droit où Dieu l’a mis, dans leur cœur !

— As-tu fini ! grommela Piquepuce de l’autre côté de la porte. Tu es ennuyeux comme la pluie, mon bibi. Essaie de pincer l’objet, mais pas de sermons, s’il vous plaît !

Il bâilla. Vincent poursuivait avec une passion croissante :

— Que faisaient les francs-juges d’Allemagne ? Ils punissaient, et ils restituaient. Je recule devant le rôle de bourreau ; c’est de là-haut que doit tomber la peine. Je ne frapperai que si un obstacle me barre la route… car je suis résolu à marcher.

— À la bonne heure, fit Piquepuce. Allons, mon fils ! mais gare aux faux pas !

— Mais je restituerai ; c’est là l’idée qui fait ma force. À qui ? Ces hommes ont laissé derrière eux d’innombrables victimes. Je ne les connais pas, et j’ai regretté souvent de n’avoir pas au moins une vengeance à exercer. J’avais tort. Ma cause n’en est