Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/280

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de Sartène pourrait bien lui amener des désagréments quelque jour. Il y a d’autres papillons que toi, mon bon, qui sont en train de se brûler à la chandelle. Je les connais comme je te connaissais : tous mes amis et amies, ces chers Compagnons du Trésor qui n’auront jamais un sou de ma tire-lire et qui viendront l’un après l’autre — ou tous ensemble — butter contre le bord de ma trappe ! Qu’est-ce que va devenir Irène, ta petite demoiselle ? Je pense à tout moi !

La gorge de Vincent rendit une sorte de râle.

— C’est bête, fit le colonel, tu n’avais qu’à rester tranquille. Je t’avais pris gâcheur de mortier pour faire de toi un gentilhomme. Tu as passé six ans à tresser la corde qui va te pendre ; c’est bête. Je comptais m’amuser avec toi et te rappeler nos voyages de nuit. Hein ! te souviens-tu : « Avez-vous quelque chose à déclarer ? » C’était drôle… Mais tu ne m’amuses plus du tout, bonhomme. Je crois que j’ai sommeil. Je vais te montrer ce que tu avais si grande envie de voir, et puis nous irons nous coucher, moi dans mon lit, toi…

Il n’acheva pas, et rien ne saurait peindre l’atroce bonhomie de son sourire.

Il se leva et fit un pas vers le lit.

À voir d’un côté la débilité de ce corps vieilli, usé jusqu’à la transparence, et de l’autre la pesante masse du lit à colonnes, il n’y avait pas à penser