Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/284

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’émotion de Vincent produisait sur lui un effet extraordinaire.

— J’en ai vendu beaucoup, de ces pierreries, beaucoup, beaucoup, reprit le vieillard dont la voix tremblait de componction. Nous ne sommes plus au temps où les capitaux dormaient paisiblement dans leur lit. J’avais des bracelets à remuer à la pelle, et des médaillons, et des ferronnières, et des ciboires, et des saints-sacrements, et des encensoirs…

J’ai eu vingt mille écus romains rien qu’avec le calice d’un Borgia… et dix mille ducats de la mitre du cardinal-archevêque de Grant, primat de Hongrie… À cinq du cent, c’est déjà, pour les deux objets, trente bonnes mille livres de rente… et mon argent me rapporte mieux que cela. Je parie que tu ne sens plus tes cordes ?

Rien que pour une mitre et un calice, dis donc ! trente mille francs de rentes ! Et j’en avais cent, j’en avais mille. Là-bas, nos Vestes-Noires étaient de bien bons chrétiens, mais cela n’empêche pas de piller les églises. Tu vois que je te parle la bouche ouverte ? À quoi sert-il désormais de se gêner avec toi ? D’ailleurs, tu savais d’avance la source de ces richesses. Pauvre minet, quelle peine tu as prise pour te casser le cou ! Moi qui te parle, j’ai soupé dans le trésor de la cathédrale de Sienne, et j’ai passé une nuit à faire mon choix dans les salles du Vatican.

Ce serait bien plus beau à voir, je ne dis pas non,