Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/297

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ce calcul, tomba comme si son intelligence eût subi un écrasement.

— Tu ne dis rien ? fit le vieillard. Ils sont partis tous ces billets doux, et tous les diamants de Saint-Pierre les ont suivis, et un tas d’autres curiosités. Je leur ai dit : Petits paresseux que vous êtes, allez et multipliez… Et ils m’ont obéi, ma chatte, car l’argent ne demande qu’à gésiner. Laisse faire un écu de cent sous, il deviendra pistole, puis doublon, puis quadruple. Le grand chêne du roi à Fontainebleau, est un ancien gland. Il a, dit-on, sept siècles. Un sou qui aurait travaillé pendant le même espace de temps serait aussi grand que la Chine et serait tout en or !

Il mit sa main tremblotante sur une des piles de papiers, qui étaient rangées en bon ordre et occupaient tout le devant de la caisse.

— Voilà ! reprit-il : un tendre père est souvent obligé de se séparer de ses enfants. Les miens sont partis, puis revenus avec leurs nouvelles familles. Il y en a tant et tant que je n’en sais plus le compte. Ne méprisons pas Crésus, qui ne savait rien, sinon engranger l’or ou le mettre en meules, c’est déjà bien joli, mais ne l’imitons plus. De nos jours, Harpagon, lui-même, mettrait des titres dans sa cassette.

Le papier, mon fils, c’est l’or actif, intelligent, vivant. J’ai fondu mes lingots, je les ai monnayés, puis prêtés à tous les souverains de l’univers et à toutes