Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/344

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le comte Julian était, par rapport au colonel décédé, comme la seconde épreuve d’une estampe est à la première.

Entr’eux, ce n’était qu’une question d’âge.

L’un et l’autre étaient des fils de cette race, homogène dans sa perversité, qui avait traversé le temps, égrenant le chapelet de ses générations en quelque façon identiques, — à tel point que, pendant des siècles, les bonnes gens des Calabres avaient pu redouter Fra-Diavolo comme un fléau immortel.

Quand le comte Julian se fut bien regardé dans la glace, perfectionnant de plus en plus son allure et son maintien, quand il eut bien radoté les mièvreries favorites du Père-à-Tous, en donnant à ses inflexions un degré croissant de vérité, il se redressa et dit :

— Ça va bien. Il est temps d’aller nous coucher pour que Giampiétro nous trouve au lit quand il apportera notre correspondance. Fanchette ne vient qu’après. Celle-là me fait peur un peu. J’aurais regret à supprimer cette chère petite sœur…

Son regard fit le tour de la chambre dont toutes les parties étaient maintenant vivement éclairées par le grand jour.

Il arrêta ses yeux sur l’armoire à glace, dont la clé était sur la serrure.

Il marcha de ce côté et fit jouer la clé, au grand contentement de Vincent, qui suivait chacun de ses mouvements avec inquiétude.