Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/346

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tecte pour le Père-Lachaise. Je ne m’ennuierai pas.

Il passa le seuil en riant bonnement. On put l’entendre fermer la porte en dehors à double tour, puis retirer la clé.

Quand le bruit de ses pas se fut étouffé dans l’éloignement, Vincent Carpentier poussa un gros soupir.

Il avait certes, la conscience exacte du danger de mort qu’il venait d’éviter, mais le sentiment qui était en lui ne ressemblait nullement à de la joie.

Il acheva en silence de couper ses liens. La souffrance lui arrachait des plaintes sourdes.

Piquepuce et Cocotte, pour faire leur cour au colonel, avaient serré les cordes si follement que le corps de Vincent était zébré de traces sanglantes, labourant, en tous sens ses chairs tuméfiées.

Il essaya d’étirer ses membres. L’étoffe de ses vêtements était entrée dans ses blessures. Le blanc de ses yeux avait des plaques rouges, tandis que ses joues restaient livides.

— Et pourtant je l’aurais tué, prononça-t-il entre ses dents qui grinçaient, je suis sûr que je l’aurais tué, s’il s’était approché. Il y a une autre force que celle des muscles. J’aurais frappé un coup de géant, quitte à tomber mort près de son cadavre !

Il sortit de l’alcôve. Ses jambes pouvaient à peine le soutenir.