Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/364

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— Allez ! dit-il au valet de chambre, je n’ai plus besoin de vous.

Il était bon tireur. Il avait gagné un grand prix aux épreuves de Berne. Sa carabine genevoise était serrée, à l’abri de toute humidité, dans sa boîte de cuir.

Roblot sortit en disant :

— Je pense que monsieur ne va pas laisser refroidir son potage ?

Vincent alla jusqu’à l’armoire où était sa carabine. Il mit la main sur la clé, mais il ne tourna pas.

Le danois gourmand rôdait autour du guéridon sur lequel on avait posé le déjeuner.

Vincent songeait laborieusement.

— Il n’y a rien d’étonnant, se disait-il, à ce que ce misérable, jouant son rôle en comédien consommé, soit venu là pour faire semblant de s’intéresser aux affaires de la comtesse Francesca Corona qu’il doit appeler sa chère petite Fanchette. Il est là pour ajouter une scène à sa comédie… César, à bas !

Le beau danois avait mis ses deux pattes sur le guéridon et flairait le potage qui allait se refroidissant.

— Non ! reprit Vincent Carpentier, dont les sourcils se joignaient sous les plis profondément creusés de son front, j’essaye en vain de m’abuser moi-même : cet homme est là pour moi, j’en suis sûr, et entre