Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/366

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

homme, capable d’acheter Paris argent comptant, au détail et à la livre.

César léchait avec un plaisir mêlé de regret le fond de la tasse, déjà vide.

Vincent mit la carabine hors de sa boîte.

— Et après ? fit-il pourtant. Je n’ai pas scrupule d’abattre un pareil monstre, mais après ? La détonation sera entendue. Aurai-je un moyen de défense ou de fuite ?

Il laissa tomber la crosse à terre en disant :

— J’ai vu à Rome un fusil à vent qui portait sa balle plus loin qu’il n’y a d’ici jusqu’à l’échafaudage.

Il restait indécis. Le danger qu’il devait courir en agissant ne faisait point question : il risquait sa liberté et sa vie.

Mais en n’agissant pas, le danger était-il moins mortel ou moins certain ?

Il avait vu le comte Julian à l’œuvre ; il savait bien que du comte Julian il n’avait à attendre ni trêve ni merci.

C’était un duel à outrance. Dans les duels de cette sorte et quand l’adversaire est un scélérat, ce n’est pas l’idée de tuer qui vient d’ordinaire à celui dont la vie fut longtemps honnête et qui jamais ne répandit du sang.

L’idée qui vient, c’est le refuge commun : la justice.