Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/55

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— Est-elle méchante ou bonne, celle-là ? interrogea Étienne.

— Il faudra précisément que le spectateur se fasse cette question, répliqua M. Bruneau, pour que le drame marche.

— Et Sophie, que fait-elle ?

— Elle pleure. Elle ne sait pas que l’opulence et le bonheur sont au seuil de sa pauvre chambrette…

— Oh ! oh ! firent ensemble les deux jeunes gens.

— Je vous dis que c’est palpitant d’intérêt ! prononça M. Bruneau, qui souligna d’un sarcasme sérieux ces derniers mots.

— Vous êtes donc un sorcier, vous ? dit Étienne incrédule.

— Non pas. Il n’y a plus de sorciers. Je suis mieux qu’un sorcier : les sorciers devinaient les histoires ; moi, je les sais sur le bout du doigt.

— Et Olympe ? que fait-elle à Paris ?

— Elle est en train de se perdre.

— Et son mari ?

— Othello millionnaire commande à Iago une fausse clef du secrétaire de Desdemone.

— Et Michel ?

— Édouard, voulez-vous dire ?

— Oui, Édouard. Est-ce qu’il aime Olympe Verdier ? »

Ce fut Maurice qui fit cette question. M. Bruneau répondit :

« N’est-elle pas assez belle pour cela ? »

Pour la première fois, un semblant d’émotion agita sa voix. Il détourna les yeux, atteignit sa grosse montre pour se donner une contenance et toussa sec.

Ce fut la toux peut-être qui fit monter à ses joues une légère et fugitive rougeur. Le temps de la remar-