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LA MORT DE CÉSAR.

— À Guernesey, répondit sans hésiter le fidèle serviteur.

Les trois défenseurs de la patrie et leur acolyte firent quatre fort laides grimaces ; mais ils aperçurent la voiture de voyage dans un coin de la cour.

— Misérable traître ! dit le délégué ; tu as menti à la république… Pied à terre, citoyens ! attachez-moi ce drôle, et commençons la visite du repaire.

On attacha Lapierre à un anneau de fer, devant l’écurie. Cela fait, le délégué ôta la laisse à son limier.

— Pille, Rustaud, pille ! dit-il.

Le limier, dressé dès longtemps à la chasse humaine, se précipita dans le grand escalier, remplissant le château de ses aboiements. Les soldats et leur chef le suivirent.

Pendant ce temps, Lapierre faisait de son mieux pour rompre ses liens, mais les soldats l’avaient garrotté en conscience, et le pauvre garçon avançait bien lentement dans sa besogne.

— Si j’étais libre ! se disait-il, j’irais chercher monsieur le vicomte, et, dans un quart d’heure, ces sans-culottes verraient beau jeu.

Mais il n’était pas libre.

Les soldats avaient bientôt perdu de vue le limier, qui s’était lancé en hurlant dans les interminables corridors du premier étage. Ils le suivaient seulement, guidés par sa voix, et le délégué l’excitait de loin avec des termes de vénerie, hideusement appropriés à cette abominable chasse.

— Il rencontre, disait-il ; il tient la voie. Le vieux blaireau ne peut nous échapper.

La cachette était située à la hauteur du deuxième étage, et pratiquée dans l’épaisseur de la muraille de l’ancien beffroi. Elle s’ouvrait sur une chambre inhabitée. César était