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L’alimentation des esclaves ! — Autre triomphe pour les partisans de l’esclavage :

— L’esclave est vêtu, disent-ils, nourri, soigné ; tandis que le travailleur libre va nu, et meurt de faim !

Prenons les faits.

Chaque esclave — tant les hommes que les femmes — recevait par mois, sur la plantation Lloyd, huit livres de porc salé, ou l’équivalent en poisson sec. Le porc était souvent gâté, le poisson pourri. Une pinte de sel, un boisseau de maïs en épis, dont la moitié ne valait rien, achevaient la pitance. Voilà ce qui, durant les trente jours du mois, alimentait des hommes au travail, de l’aube à la nuit !

Le vêtement allait de pair avec la nourriture. Pour l’été, deux chemises de toile, pantalon idem ; pour l’hiver, jaquette, pantalons et chaussettes en laine brute.

Les enfants au-dessous de dix ans, n’avaient ni chaussettes, ni jaquette, ni pantalons. Deux chemises par an suffisaient à leurs besoins. Ce costume usé, garçons et filles, allaient vêtus de leur peau.

Point de lit. Une couverture en tenait lieu. Les adultes seuls y avaient droit. La marmaille nichait où elle pouvait ; en été partout ; en hiver au plus près de l’âtre, les pieds dans les cendres.

Au demeurant, la question du lit importait peu. Dormir, était la grande affaire. Après une journée de rude labeur, restait le repas à préparer, les hardes à raccommoder, les chemises à blanchir, bien d’autres menus travaux qui écornaient la nuit.