larmes la multitude innombrable de voiles qui fuyaient vers le vaste océan. Ce spectacle ne manquait jamais de me toucher profondément. Mes pensées se frayaient un passage ; et sans avoir d’autre auditeur que le Tout-Puissant, voici comment j’exhalais l’amertume de mon âme d’une manière rude, dans une apostrophe à la multitude de vaisseaux en mouvement :
« Les câbles qui vous retenaient sont détachés, vous voilà libres ! moi, je reste accablé du poids de mes chaînes, moi, je suis esclave ! Vous vous avancez gaiement au gré de la douce brise ; moi, je me traîne tristement devant le fouet sanglant ! Vous, vous êtes les anges de la liberté ; vos ailes rapides vous emportent autour du globe ; moi, je gémis dans des entraves de fer ! Oh ! que je voudrais être libre ! Oh ! que je voudrais être sur un de vos ponts magnifiques, et sous la protection de vos ailes ! Hélas ! entre moi et vous coulent les eaux troublées. Éloignez-vous ! avancez ! Oh ! que ne puis-je vous imiter ! Si je pouvais nager ! si je pouvais voler ! Oh ! pourquoi suis-je né un homme dont on a fait une brute ! Le joyeux navire est parti ; il a disparu dans le lointain obscur. Moi, je suis laissé dans les tourments affreux d’un esclavage interminable. Oh ! mon Dieu ! sauve-moi ! Oh ! mon Dieu ! délivre-