Page:FRAD006 G1259.pdf/38

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

[101] La maison où logent les sieurs curés de Vente, dans la rue de l’auditoire[1], appartient à l’hôpital. La communauté la loue et en donne 50 livres tous les ans. Elle a été donnée par le feu sieur Niel, chanoine[2].

La salle d’en-haut est pour les hommes. Il y a trois lits comme dessus[3]. Ils n’ont point de rideaux. A côté de ladite salle il y a un lit, comme aussi dans la chambre qui est au fond de ladite salle. Il n’y a point d’hommes, maintenant, dans les lits.

On a réglé au bureau de la direction demi-livre de viande par jour pour chaque malade[4]. On prend le pain chez le fermier du four, à taille[5], et la gouvernante[6] fait une taille, et de la viande aussi, et les directeurs ont soin de faire le compte et d’ordonner le paiement, à la fin de leur mois d’exercice.

[102] Ce sont les directeurs qui règlent l’entrée des pauvres, sur l’avis du médecin. De même pour la sortie.

On donne 18 livres au sieur Isnard, médecin, chaque année, à la Saint-Jean, et 12 livres au sieur Suche, chirurgien, le ler novembre. Ils sont obligés de servir toute l’année.

La servante a 18 livres par année. Elle s’appelle Anne Raylone. C’est la veuve de Jean Galanton[7]. Elle sert l’hôpital depuis quatorze ans. Elle a quelque peu de bien. Autrefois on ne la nourrissait pas. Maintenant elle se prévaut du reste des malades.

Il y a une fille âgée de cinquante ans, nommée Marguerite Morelle, à qui on donne un pain par jour, de celui qu’on fait pétrir pour l’aumône publique[8]. Elle sert pour la grosse lessive, pour la lessive et autres emplois,

[103] Il y a un petit jardin qu’on cultive pour en tirer des herbages[9] et des légumes pour les pauvres.

Le bas du logement consiste en une cuisine, une arrière-cuisine, deux bûchers, une chambre fort humide dans laquelle on tient une paillasse sur un lit de bois, avec de la paille dans la chambre, pour les pauvres passants[10].

Mme la marquise de Vence a fait remplir deux creux dans le jardin, de 14 muids de chaux, pour élever un corps de logis qui est à droite en entrant et qui n’a qu’un plain-pied. On aurait dessein de le porter au moins jusqu’au-dessus du premier étage, afin de pouvoir faire une salle pour les hommes à plain-pied de celle des femmes. On nous a fait observer que les fondements de ce corps de logis ne sont pas bons et qu’il faudra les démolir et en faire d’autres.

  1. L’auditoire : la salle d’audience où siège la justice seigneuriale. Ce bâtiment a été acheté en commun, au début du XVIIe siècle, par les deux seigneurs de Vence, l’évêque et le baron. Il doit sans doute s’agir de la rue dite aujourd’hui de Saint-Lambert, jadis rue de la vieille audience.
  2. En louant cette maison à l’hôpital pour y loger les deux curés, la communauté reconnait ainsi qu’elle est tenue de leur fournir un logement, ce qu’elle contestera à d’autres moments de son histoire, affirmant qu’il incombe au chapitre d’y pourvoir. M. Oswald Baudot pense qu’une ordonnance royale de 1695 obligeait les communes à loger le curé.
  3. Le document écrit "comme dessous". Et peut-être est-ce bien "comme dessous" qu’il convient de lire, dans le sens de "comme à l’étage d’en-dessous".
  4. On peut croire qu’ici le mot "viande" a le même sens que de nos jours, alors que dans des temps plus ancien il avait le sens général de nourriture (viande, adjectif verbal, ce qui est nécessaire à la vie), la viande au sens où nous l’entendons étant alors exprimée par le mat "chair". Demi-livre fait environ 200 grammes.
  5. Le fermier est celui qui loue les fours de la communauté. "A taille" c’est-à-dire à crédit. Le fermier fait une taille (une entache) sur un bâton chaque fois qu’il donne du pain.
  6. La gouvernante : celle que les anciennes délibérations de la communauté nommaient l’hospitalière.
  7. Raylone, Galanton : patronymes de moi inconnus.
  8. Le pain qu’on fait pétrir pour l’aumône publique : ce n’est sans doute pas du meilleur.
  9. Herbages : nom qu’on donne alors à ce que nous appelons légumes, le nom de légumes désignant alors des denrées en grains (pois, fëves, haricots).
  10. On réserve aux passants les plus mauvaises conditions de logement : dans le lieu le plus humide, sur la paille.