Page:Fabié - Fleurs de Genêts, 1920.djvu/86

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Eh quoi ! Ses blés chéris aux étrangers en proie !
Ses sueurs de l’automne et ses peurs de l’hiver,
Et, depuis les beaux jours, son orgueil et sa joie,
Ces blés roux comme l’or et lourds comme le fer ;

Ces blés que, jour à jour et comme par prodige,
Il a vus naître, croître, et fleurir et jaunir,
S’étoiler de bleuets, puis pencher sur leur tige
L’épi mûr qu’à genoux l’homme devrait bénir ;

Ces blés faits de son sang et du sang de sa race,
Et du sang de la terre où dorment les aïeux,
Porteraient au grenier d’un créancier vorace
Ce qu’ils tiennent de l’homme et du sol et des cieux !

À cette horrible idée, il s’agite dans l’ombre
De la profonde alcôve où ses pères sont morts,
Et qui tremble sous lui comme un vaisseau qui sombre,
Prêt à jeter sa charge humaine à d’autres bords.