Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, première série, 1916.djvu/240

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problème des conserves alimentaires, le problème qui consiste à déposer par avance dans la cellule la quantité nécessaire de gibier et à le maintenir des semaines entières dans un parfait état de fraîcheur, que dis-je, presque à l’état de vie, bien que les victimes soient immobiles ainsi que l’exige la sécurité du vermisseau qui en fait pâture. Les ressources les plus savantes de la physiologie accomplissent cette merveille. Le stylet à venin est dardé dans les centres nerveux une seule fois, ou bien à diverses reprises, suivant la structure de l’appareil d’innervation. Ainsi opérée, la victime conserve les attributs de la vie, moins l’aptitude de se mouvoir.

Examinons si les Bembex font usage de cette profonde science du meurtre. Les Diptères retirés d’entre les pattes du ravisseur entrant dans son terrier ont, pour la plupart, toutes les apparences de la mort. Ils sont immobiles ; rarement, sur quelques-uns, peut-on constater de légères convulsions des tarses, derniers vestiges d’une vie qui s’éteint. Les mêmes apparences de mort complète se retrouvent habituellement chez les insectes non tués en réalité, mais paralysés par l’habile coup de dard des Cerceris et des Sphégiens. La question de vie ou de mort ne peut alors se décider que d’après la manière dont se conservent les victimes.

Mis dans de petits cornets de papier ou dans des tubes de verre, les Orthoptères des Sphex, les Chenilles des Ammophiles, les Coléoptères des Cerceris gardent la flexibilité de leurs membres, la fraîcheur de leur coloration et l’état normal de leurs viscères pendant des semaines et des mois entiers. Ce ne sont pas des cadavres, mais des corps plongés dans une torpeur qui n’aura pas de réveil. Les Diptères des Bembex se comportent tout autrement. Les Éristales, les Syrphes, tous ceux enfin dont la livrée présente quelque vive coloration, perdent en peu de temps l’éclat de leur parure. Les yeux de certains Taons, magnifiquement