de l’Abeille domestique. Le point blanc est déposé sur le thorax ; la maçonne part, et la marque se sèche en route.
Une première fois, je prends deux Chalicodomes des murailles occupés à leurs nids sur les galets des alluvions de l’Aygues, non loin de Sérignan ; et je les transporte chez moi à Orange, où je les lâche après les avoir marquées. D’après la carte de l’état-major, la distance entre les deux points est d’environ quatre kilomètres en ligne droite. La mise en liberté des captives a lieu sur le soir, à une heure où les Hyménoptères commencent à mettre fin aux travaux de la journée. Il est alors probable que mes deux Abeilles passeront la nuit dans le voisinage.
Le lendemain matin, je me rends aux nids. La fraîcheur est encore trop grande, et les travaux chôment. Quand la rosée est dissipée, les Maçonnes se mettent à l’ouvrage. J’en vois une, mais sans tache blanche, qui apporte du pollen à l’un des deux nids d’où proviennent les voyageurs que j’attends. C’est une étrangère qui, trouvant inoccupée la cellule dont j’ai moi-même expatrié la propriétaire, s’y est établie et en a fait son bien, ignorant que c’est déjà le bien d’une autre. Depuis la veille, peut-être, elle travaille à l’approvisionnement. Sur les dix heures, au fort de la chaleur, la maîtresse de céans survient tout à coup : ses droits de premier occupant sont inscrits pour moi en caractères irrécusables sur le thorax, blanchi de craie. Voilà une de mes voyageuses de retour.
À travers les vagues des blés, à travers les champs roses de sainfoin, elle a franchi les quatre kilomètres ; et la voilà de retour au nid, après avoir butiné en route, car elle arrive, la vaillante, avec le ventre tout jaune de pollen. Rentrer chez soi, du fond de l’horizon, c’est merveilleux ; y rentrer la brosse à pollen bien garnie, c’est sublime d’économie. Un voyage, pour les Abeilles,