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PERSPECTIVES LOINTAINES DE LA DOCTRINE


S’il en est ainsi, il faut, par tous les moyens possibles, détruire, abolir, anéantir la morale et livrer l’homme à toutes ses passions et le pousser à s’abandonner à elles… Et voilà la conclusion et la solution. — Mais non, répond Nietzsche après avoir réfléchi, non pas ! Ce qui résulte de tout ce que nous venons de dire, ce n’est pas que la morale soit mortelle aux hommes, c’est qu’elle est mortelle au plus petit nombre des hommes et mortelle à la société, qui doit être gouvernée par ces hommes-là pour subsister, et mortelle à l’humanité qui doit être dirigée par ces hommes-là pour n’être pas une poussière et une fange. Mais elle n’est nullement mortelle pour le grand nombre, pour l’espèce inférieure, pour la masse. Elle est sa vie même. Elle est la conception de vie, la règle de vie et l’idéal de vie à quoi cette masse peut s’élever et qui lui est nécessaire, lui étant naturelle : « Ce qui n’est