Page:Faguet - Pour qu’on lise Platon, Boivin.djvu/104

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s’éloignait évidemment des voies ordinaires de Socrate. Ce n’est pas douteux.

Mais il faut, pour comprendre, soit le dessein, soit seulement l’état d’esprit de Platon, réfléchir à plusieurs choses. D’abord en tout temps, et que ce soit dans la Grèce antique ou dans l’Europe moderne, il est extrêmement difficile de philosopher sans être métaphysicien, de philosopher en s’interdisant la métaphysique. Il n’est point du tout facile de tracer la limite ne moveatur entre ce qui est métaphysique et ce qui ne l’est point. Que des choses dépassent la portée de nos observations, rien n’est plus facile à constater ; mais que des choses dépassent la portée de nos raisonnements, et quelles sont ces choses, c’est ce qu’il est beaucoup plus malaisé de déterminer ; parce qu’il n’est pas si facile que l’on peut croire de distinguer une hypothèse raisonnable d’un raisonnement et de dire : ceci est imagination, ceci est raisonnement véritable.

La métaphysique se mêle insidieusement à toutes nos opérations intellectuelles, parce que nous sommes toujours tout proches d’elle et que nous plongeons en elle, en quelque sorte. La métaphysique n’étant que le nom que nous donnons à notre ignorance, à ce que nous devons ignorer, à ce qu’il est convenable que nous nous résignions