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Page:Fargèze - Mémoires amoureux, 1980.djvu/174

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s’épanouissaient sur ma poitrine. Tout son corps s’agitait, m’échappait pour me revenir, et ses crispations, presque aussitôt que je l’eus fixée, me renseignèrent sur la communauté de notre extase. Chère petite Jeanine, à qui, hier encore, je songeais si peu ! Je ne lui donnai pas le temps de connaître la langueur qui suit ces galvanismes. Elle était presque neuve, sans l’ombre d’un vice, et cela me surprit, si cela m’enchanta, quand, préludant à une reprise, je dus vaincre sa pudique résistance pour aller cueillir en son sillon le fruit même de son sexe. Ce fut une expirante victime qu’après cela je tins de nouveau dans mes bras.

Elle ne pouvait rester longtemps, étant partie en hâte. Elle se rhabillait et je ne cessais d’échanger avec elle de tendres attouchements. À bientôt, petite Jeanine ! Je lui jurai que ma première visite serait pour elle, le jour même de mon retour.

J’étais heureux, j’étais épris comme jamais je ne l’avais été, peut-être. Je me désolais d’une séparation qui serait longue. Quinze jours, trois semaines sans la voir, sans refaire l’amour avec elle. Jeanine ! Jeanine ! Je l’avais approchée trois fois sans me rassasier d’elle et je la désirais passionnément.

Je partais le lendemain et quelques emplettes devaient m’occuper, mais l’obsession de Jeanine me tourmentait au point de m’interdire tout esprit de suite. Le soir après dîner, j’allai dans Paris sans but, la tête vide. Vers dix heures et demie je me trouvai sur le boulevard. Le froid se montrait agressif sous un ciel idéalement pur. Je songeais à Jeanine, et, subitement, sans transition, un désir impérieux me prit, un désir fou et qu’aussi bien je jugeai tel, celui de faire l’amour, de le faire avec Anaïs, cette putain d’Anaïs. J’arrivais rue Le Peletier, où vingt crinolines m’entourèrent. J’y piétinai jusqu’à une heure, m’arrêtant parfois dans l’encoignure où s’étalait, gigantesque, l’enseigne du photographe Disderi. Enfin m’apparurent la capeline et le double collet de la sœur de Titi. Elle sortait du café de l’Opéra. Je courus à elle, qui me vit venir et voulut fuir. Je la retins. « Ne te sauve pas, je ne te veux pas de mal, lui dis-je. Écoute J’ai envie de toi. Viens. Je